Extrapolation des valeurs des champs magnétiques à fréquence industrielle mesurées à proximité des liaisons électriques

Introduction

Au cours des deux dernières décennies certaines réglementations nationales ont exigé des mesures du champ magnétique à fréquence industrielle (fréquence du réseau), soit pour vérifier la conformité à une « limite d'exposition mesurable », soit pour informer la population  sur son exposition, « réelle » ou « maximale attendue », au champ magnétique.

Le champ magnétique produit par un réseau électrique dépend essentiellement des conditions de charge du système électrique. Du fait des variations de la charge et à la différence du champ électrique, l'amplitude du champ magnétique varie selon deux modes, dont les échelles de temps sont clairement distinctes : des variations dans le temps rapides et périodiques, et des variations lentes dans le temps. Il faut par conséquent, en matière d'exposition au champ magnétique, faire une distinction entre exposition de courte durée et exposition de longue durée.

Les « limites mesurables d'exposition au champ magnétique » nationales, pour les expositions court-terme et long terme et leurs définitions, d'une part,  et la définition des « conditions de charge de référence » auxquelles sont associées ces limites, d'autre part, sont différentes d'un pays à un autre.

Quand il est pratiquement impossible de procéder aux mesures dans les « conditions de charge de référence » définies nationalement, les ingénieurs sont confrontés à la nécessité d'extrapoler les valeurs obtenues dans les conditions de leurs mesures pour déterminer celles qui auraient été obtenues pour les conditions de charge de référence associées aux limites.

Pour le côté mesure comme pour le côté extrapolation du problème, certaines modalités sont bien arrêtées au plan international, parce qu'il existe un consensus général, mais pour certaines l'interprétation et l'importance varient selon les autorités.   

Pour le côté mesure du problème, la procédure d'obtention des « valeurs mesurées du champ magnétique en un point » est la partie bien définie. Pour le côté extrapolation du problème, la partie bien définie est la méthodologie de calcul du champ magnétique à fréquence industrielle qui est suivie pour réaliser l'extrapolation à la « condition de charge de référence », qui est basée sur la loi de Biot et Savart.

Par ailleurs la définition de la « limite mesurable de l'exposition au champ magnétique » et des « conditions de charge de référence » associées affiche des différences entre pays. En conséquence, du fait des objectifs différents du programme de mesure requis, leurs exigences sont également différentes.

En outre il existe un besoin d'un cadre général qui fournisse, aux ingénieurs de terrain qui doivent faire face à ce problème, des directives pour identifier leur cas, des informations sur les paramètres les plus importants qui sont susceptibles l'affecter, et des recommandations sur les spécifications du programme de mesure, qui permettront une extrapolation efficiente des valeurs mesurées.

Réalisant que la question des champs électromagnétiques (EMF) est très éloignée des instruments techniques utilisés quotidiennement par les ingénieurs de terrain, CIGRE a publié à partir de 1980 des Brochures Techniques (BT), pour présenter le sujet aux ingénieurs de terrain.

• La BT CIGRE 021 (1980) constituait une introduction élémentaire aux méthodes de calcul des champs électriques et magnétiques ;
• La BT CIGRE 074 (1993) donnait une description simple des concepts de champs magnétiques et électriques ;
• La BT CIGRE 320 (2007) traitait de la détermination des indicateurs les plus appropriés pour quantifier « l'exposition aux champs magnétiques ». On y soulignait l'importance de distinguer les deux échelles de temps : variations rapides périodiques et variations lentes dans le temps, et on montrait que les indicateurs les plus pertinents pour quantifier les expositions aux champs magnétiques de courte durée et de longue durée étaient différents ;
•  La BT CIGRE 373 (2009) passait en revue et présentait un ensemble exhaustif de techniques de réduction des champs magnétiques à fréquence industrielle émis par les systèmes électriques ;
• La BT CIGRE 375 (2009) constituait un guide sur les meilleures pratiques de réalisation des mesures des champs électriques et magnétiques à basse fréquence.

Domaine couvert

La BT s'intéresse à la manière dont on peut extrapoler des valeurs de champ magnétique, mesurées à une certaine charge, pour d'autres conditions de charge et déterminer des valeurs caractérisant les expositions limites au champ magnétique.

La BT est destinée aux ingénieurs de terrain qui sont concernés par le sujet (au plan technique ou au plan administratif), aux autorités de régulation et aux organismes de normalisation. Elle a pour objectif de définir le cadre général qui leur permettra d'identifier leur cas et fournira, également, des informations sur les paramètres qui peuvent affecter leur cas, et des recommandations sur les spécifications des mesures nécessaires qui autoriseront une extrapolation efficiente des valeurs mesurées.

La principale difficulté pour un ingénieur de terrain réside apparemment dans la caractérisation du cas auquel il ou elle fait face, ou essaie de traiter, à la demande de leurs autorités de régulation. Il faut en effet capter la différence, souvent plutôt mal comprise, entre les concepts de « champ magnétique » (qui est un champ vectoriel variant dans le temps - voir Figure 1), de « valeur du champ magnétique en un point donné » (qui est un vecteur variant dans le temps), de « champ magnétique résultant » qui est un champ scalaire qui varie lentement dans le temps (voir Figure 2), de « valeur mesurée du champ magnétique en un point » ou de « champ magnétique résultant » (qui est un nombre qui varie lentement dans le temps), et « d'indicateur d'exposition au champ magnétique » (qui est seulement un nombre qui veut représenter approximativement un champ vectoriel qui varie dans le temps). La BT, qui explique les différences entre les concepts mentionnés précédemment représente, de cette manière, un maillon supplémentaire dans la chaîne d'informations que constituent les brochures CIGRE sur le sujet des champs magnétiques produits par les réseaux électriques.

Contenu de la Brochure Technique

Dans la BT on présente d'abord, rapidement, les caractéristiques principales du champ magnétique produit par les liaisons électriques, en soulignant les effets de leurs paramètres de conception, ainsi que les effets des paramètres variables, tant pour les lignes aériennes que souterraines. Une annexe permet au lecteur intéressé de trouver une brève introduction aux concepts fondamentaux des champs magnétiques variant lentement dans le temps.

Ensuite on donne des exemples des limites mesurables adoptées dans différents pays, pour des expositions de courte durée et de longue durée, ainsi que les définitions de certaines des conditions de charge de référence correspondantes qu'ils ont retenues.

Puis, après un rappel rapide de la définition du terme « valeur mesurée du champ magnétique », on présente des spécifications générales applicables aux mesures. On souligne la différence importante qui existe dans la définition des « limites mesurables d'exposition au champ magnétique » qui a un impact sur l'objectif et les spécifications du programme des mesures (entre autres sur les exigences concernant l'extrapolation). Ainsi certaines limites mesurables de l'exposition au champ magnétique sont exprimées en termes de « valeurs efficaces instantanées » de l'amplitude du champ magnétique, alors que d'autres, surtout pour des limites d'exposition de longue durée qui, tenant compte de ses variations lentes dans le temps, sont exprimées en termes de « valeur statistique » de l'amplitude du champ magnétique.

Enfin, pour illustrer par des exemples les méthodes effectivement appliquées, trois exemples pratiques d'extrapolations de valeurs mesurées de champ magnétique à fréquence industrielle sont exposés, correspondant à trois politiques nationales différentes.

Conclusions

Comme conclusions importantes on doit retenir :

• Il existe un besoin d'extrapolation des valeurs obtenues dans les programmes de mesure, pour en tirer celles qui auraient été mesurées pour les « conditions de charge de référence » définies au plan national, qui est lié à l'impossibilité pratique de réaliser les mesures dans les conditions de charge de référence définies nationalement. La situation est ainsi différente d'un pays à l'autre.
• La méthode d'extrapolation utilisée par les différents pays est, pour la totalité d'entre eux, basée sur le calcul du champ magnétique dans les « conditions de charge de référence », utilisant la loi de Biot et Savart bien connue. Les différences de détail entre les méthodes effectivement appliquées par les différents pays portent sur les « conditions de charge de référence » qui sont différentes, ainsi que sur les approximations permises qui varient entre pays.

Les Membres du GT C4.28 espèrent que la Brochure répondra à ses objectifs en assurant un partage des connaissances existantes  sur les limites d'exposition aux champs magnétiques, et sur la réalisation des mesures nécessaires à la vérification du respect de ces limites d'exposition.